À la une
• ÉDITO
  • EN ORANGE. ET EN ÉPONGE.

    Le soleil nous donne du cœur à l’ouvrage, le soleil nous encourage, le soleil nous appelle à la plage. Nous ne sommes pas au bord de la mer ? Peu importe, la plage est dans notre tête. La preuve : notre crème solaire BiO anti-UV, à ne surtout as oublier, même en ville, notre bob japonais acheté à Arles, chez nos Moustiques préférés, nos inlassables projections de nouveaux maillots de bain au look improbable parce que avons de l’humour. Avec un anneau sur le devant du soutien-gorge et sur les côtés de la culotte. En orange. Et, tant qu’on y est, en éponge. Les années 70 bordent nos rêves de vacances d’une esthétique un peu ringarde mais tellement joyeuse. Nostalgie ? Renaissance, plutôt. Renaître à soi-même à chaque minute de résilience, personnelle et collective. Disons-le sans détours, quand le climat ambiant est aussi désespérant, il convient de booster dopamine et sérotonine « bonne mine par tous les temps ». À coups de volontarisme, c’est clair. Sinon, bonjour la tête de dix pieds de long. Pour aller bien, on cherche les couleurs, les saveurs, ces bonheurs à portée de quotidien. Les livres, en tête de liste. Du rigolo « Gâteau frigo » (Rouergue) au souverain « Atlas et herbier de Camargue » aux cyanotypes de plantes rares, menacées et protégées (Actes Sud), les déclencheurs de bonne humeur nous accompagnent au plus près de nos jours, au creux de nos nuits, aussi. En cas d’insomnies, quand la méditation ne parvient pas à apaiser nos colères devant la vanité systémique, le vide apocalyptique qui impose chaque jour à notre corps une violence vertigineuse, nous ne dirons jamais assez la fidélité des livres à nos attentes intimes, la tendresse infusée qu’ils éveillent en nous, la reconnaissance éperdue. Un barrage contre le maléfique ? Un ravissement. Les livres sont des amants. Notre soleil, les livres. Et notre ombre, notre lumière, notre ciel, notre échappée plus belle que jamais quand tout est trop moche alentour. Quand des livres de cuisine ouvrent également, à leur manière, la porte de notre désir, il ne faut pas hésiter. Et vous n’hésitez pas. Vous laissez cet appétit de plaisir se frayer un chemin en vous, parfois plus qu’un chemin, une large voie à travers les pensées, et vous plongez dans les compositions végétales qu’elles proposent, vagues douces de frémissements des sens. En éponge ou non, orange ou pas, avec ou sans anneaux 70, le maillot de bain vole par-dessus les moulins. C’est dans le plus simple appareil que le cerveau -puis le corps tout entier - plonge dans la mise en œuvre de cette nourriture du corps et de l’esprit, en puissante correspondance avec la nature. Prendre soin de soi, on se doit bien ça.

    Coline Enlart, Rédactrice en chef