Les auteurs se sont bien amusés ! Surtout Alain Serres qui débarque dans cet ouvrage là où on ne l’attendait pas, avec des textes loufoques, sortis de nulle part. Ou plutôt si : d’une imagination totalement décalée qui glisse subtilement l’essentiel entre les lignes, à la limite d’un dadaïsme qui nous surprend pour mieux nous recentrer.
Quelle pomme serions- nous de rire de ces bonnes poires qui croient, peut-être, ressembler à autre chose que des poires ! Comme nous ne sommes pas vraiment ‘“pomme”, nous entrons de plain-pied , avec un plaisir avoué, dans l’univers de la diversité des poires que Martin Jarrie peint au plus près de leurs détails, ceux-là même qui fondent leur identité singulière. Toutes différentes, toutes expressives, toutes poétiques : ces poires dont la réalité apprend la beauté de chaque espèce vivante, au-delà de l’humain et de son regard trop souvent réducteur.
On pense au temps qui passe, aux rides, aux taches sur le visage, aux rires et aux sourires, aux stigmates de l’existence, des expériences de vie, aux métamorphoses parfois à peine visibles, et aux métenpsycoses. On s’identifie aux poires que l’on a soudain dans la peau, on projette sur elles un secret devenir, on se nourrit de la lisibilité généreuse de leurs messages impromptus. Quelle sagesse ! Quelle attention ! Autant dire que les jeunes enfants à qui ce livre est destiné (supposément à partir de 7 ans, mais bien avant et bien après) vont faire des envieux chez les adultes appelés à regarder d’un tout autre œil, avant de les manger, la peau des fruits qu’ils achètent ou cueillent sur un arbre, guettant une danse, une trace d’archet de violoncelle, ou un rouge-gorge pour une poire-oiseau “si ça lui chante”. Et nous enchante.
